City Stade de Sarah Hassenforder, Tapuscrit (157) éditions Théâtre Ouvert, 2023 – Centre National des Dramaturgies contemporaines.

City Stade de Sarah Hassenforder, Tapuscrit (157 ) éditions Théâtre Ouvert, 2023 – Centre National des Dramaturgies contemporaines.

Sarah Hassenforder est née à Toulouse en 2000. Elle est autrice et dramaturge. Elle a écrit un diptyque autour de la jeunesse : Pépite (2020), puis Billie & Bonnie (2021). En août 2022, elle a participé au Chantier de Théâtre Ouvert, Surfaces de Réparation, aux côtés de cinq autres auteurs et autrices, dirigés par Sonia Chiambretto.

De 2018 à 2021, elle suit un Deust Formation de base aux métiers du théâtre à Aix-Marseille Université. Durant cette formation, elle travaille aux côtés de Sonia Chiambretto, Christelle Harbonn et Olivia Corsini.

En septembre 2021, en parallèle de sa formation théâtrale, elle s’intéresse à la traduction et entame une licence d’occitan à l’Université Toulouse- Jean Jaurès.

En février 2023, City Stade est mis en espace par Pierre Cuq à Théâtre Ouvert dans le cadre de l’Ecole Pratique des Auteurs de Théâtre (EPAT). City Stade est son premier texte publié, le premier volet d’un diptyque autour de l’adolescence. La même année, City Stade est finaliste de jeunes textes en liberté #8 (avec le titre Qui peut faire de la voile sans vent) et son texte jeunesse Abribus est finaliste du prix Annick Lansman 2023.

En 2019, elle co-écrit le spectacle Le Projet Blanche-Neige, avec Justine Canetti, joué dans des lieux non dédiés (centre équestre, chantier), en région PACA.

City Stade donne à voir une bande, composée de très jeunes gens, Ibtissem (16 ans), Solal (17 ans), Elie (17ans), Maï-Ly (16 ans), Moïra (16 ans), Tarek 16 ans,  Emeka (18 ans), Léon (12 ans) et Oscar (15 ans), selon les didascalies de l’autrice Sarah Hassenforder. 

Ce soir, la bande fait la fête. Dans le parc derrière le City, certains dansent, certains rient, certains flirtent, certains pleurent et certains font la gueule. Cette soirée est celle des vivants dans laquelle les morts s’immiscent. 

La fête dérape, les langues se délient, les souvenirs hantent les esprits et les limites sont repoussées, jusqu’à l’extrême. Comment faire, quand on n’est pas des adultes mais qu’on ne nous laisse plus être des enfants ? Comment vit-on avec nos fantômes et ceux des gens qu’on aime ?

L’action se passe significativement dans Une ville, sa route départementale, sa zone industrielle, son Lidl, son rond-point, son Casino, son Netto, ses quartiers pavillonnaires, ses lampadaires cassés, sa rue principale qui court de sa poste à son école, son aire de jeu sans toboggan, son collège, son lycée, son snack, son parking, son gymnase, son City Stade et son parc derrière lui.

Préalablement, on a pris soin d’acheter ou/et de dérober chez soi de quoi grignoter un peu et boire sans frais – bière, vin, beuh -, pour tous ensemble se retrouver le soir, dans le parc derrière le City.

Au coeur su parc. Un amphithéâtre en bois abîmé par le temps, entouré d’eau et d’arbres et mangé par le cimetière de déchets abandonnés, de canettes vides et d’éclats de verre. Quelques rondins de bois permettent d’accéder à ce qui servait autrefois de scène. Plus loin, un amas de pneus de toutes tailles, près du chemin qui conduit au lac. Toustes sont installé.e.s sur des sièges de fortune, les tentes tout juste montées. Léon mange du kiri.

Un extrait de la pièce :

Tarek part vers le lac en bousculant Emeka.

Moïra. C’est pas juste Emeka / tu peux pas nous en vouloir de

Emeka. de quoi ? / de vivre notre meilleure vie comme si de rien n’était ? / de faire semblant d’aller bien ? / cinq ans putain ça fait cinq ans / ça s’est passé ici / et on est là on tire on fume on rigole / on danse sur leurs cadavres

Ibtissem. Arrête Emeka. / Un temps. / Moha il est toujours là / notre père il pleure quand il croit qu’on n’est pas là / la mère de Solal et Moïra parfois elle oublie / elle vient chercher Anatoli au resto.

Elie. Ils ont renommé le parc

Solal. Quoi ?

Elie. C’est écrit sur le panneau à l’entrée / parc Mohammed-Anatoli

Emeka. C’est tout ce que ça leur inspire la mort de deux gosses, / un putain de parc ? / Un temps / On est coincés dans ce trou pourri avec nos fantômes / et des putains de panneaux / et un skatepark claqué au sol / et des ballons de basket dégonflés / et la putain de forêt / y a que Maï-Ly et son violoncelle qui ont une chance de se barrer d’ici / notre avenir à nous c’est des jobs pourris et des appartements claqués et nos darons qui ont zoné au City comme nous et qui mourront ici comme nous / vous vous êtes là à charbonner toute la journée en pensant vous barrer / acharnez-vous si ça vous amuse / mais moi / je garde nos morts / parce qu’il faut bien que quelqu’un le fasse….

A-t-on explicité ou compris la mort de Moha et d’Anatoli ? Des questions non résolues au fait des préoccupations adolescentes de jeunes gens dont le parler identitaire bien frappé, propre à une reconnaissance générationnelle est elliptique et taiseux, en même temps qu’évocateur et efficace.

Véronique Hotte 

City Stade de Sarah Hassenforder, Tapuscrit (157 ) éditions Théâtre Ouvert, 2023 – Centre National des Dramaturgies contemporaines.