Les Garçons qui croient sont très seuls, les autres garçons sont perdus, une création du Groupe T, conçue par Théo Cazau, Antonin Fassio et Juliane Lachaut. Texte Théo Cazau, mise en scène Juliane Lachaut, à La Commune – CDN Aubervilliers.

Les Garçons qui croient sont très seuls, les autres garçons sont perdus, une création du Groupe T, conçue par Théo Cazau, Antonin Fassio et Juliane Lachaut. Texte Théo Cazau,
mise en scène Juliane Lachaut, scénographie, costumes et régie générale Antonin Fassio, dramaturgie et collaboration artistique Camille Blanc, assistanat à la mise en scène Marie Vandame, collaboration scénographie Quentin Frichet, composition musicale, interprétationet régie son Solal Mazeran, création et régie lumière Louise Brinon. Avec Camille Blanc, Jean-Yves Duparc, Frédéric Fachena, Olivier Horeau, Yaëlle Lucas, Bertrand Schiro et Aurélien Vacher.

Les Garçons qui croient sont très seuls, les autres garçons sont perdus, met en scène un groupe de Blancs interprétés par six hommes et une femme, Camille Blanc, Jean-Yves Duparc, Frédéric Fachena, Olivier Horeau, Yaëlle Lucas, Bertrand Schiro et Aurélien Vacher. Franco de port, ils interrogent l’usage de la violence dans l’urgence climatique, renonçant à leurs privilèges, trouvant par l’empathie, une nouvelle relation à soi, aux autres – une place nouvelle dans les écosystèmes. 

« Reposant sur l’imaginaire de groupes d’action paramilitaires, comme des Fioretti de Saint François d’Assise de Rosselini qui regarde les moines franciscains en enfants guidés par la joie. Ce groupe d’hommes ressemble donc aux premières communautés chrétiennes, fondements des différents ordres monastiques, ces groupements marginaux d’hommes cherchant dans la nature, la langue, et le ciel, une forme de transcendance à laquelle se soumettre, à la recherche d’un être au monde dénué d’égo, de doute, de jugement », écrivent les concepteurs enthousiastes. 

Et les acteurs, portant robe de bure – cape, capuche et capeline à l’aura sacrée -, figurent des personnages anachroniques, hors du temps, et naturellement oints de douceur et de bonté. Un monde décalé par rapport à l’emportement et à la précipitation de nos temps bousculés, prenant le temps en échange de s’écouter, de comprendre, de saisir patiemment le raisonnement de l’autre. Soit un portrait de groupe loufoque mais significatif d’exigence humaniste et de sérénité – sourires, humour, attente, autocritique, discussion et débats constructeurs et structurants, en trois points. Ils ne cessent, entre interventions et échanges verbaux, de murmurer ou psalmodier en leur intérieur.

Une controverse, par exemple, sur le confort d’un matelas pour un « moine » rabelaisien qui tient un nouveau-né dans ses bras et dont il ne veut se défaire ni partager la garde avec ses confrères. Une controverse aussi sur le comportement ultime d’un des leurs qui a engagé la vie d’un « frère » en allant dans le danger et les périls manifestes saboter les installations en béton d’un aéroport en construction. Le second « frère » de ce trio initial, traité de lâche, dénonce le manque d’évaluation de l’accusateur et coupable soumis dès lors au « lit de justice », où la responsabilité est pesée.

Aussi la violence est-elle aussi l’apanage de ces êtres doux qui font du théâtre, par temps de crise climatique, dans les campagnes et aux abords des villes pour tâcher de prêcher de nouveaux camarades de lutte, et pour sortir de la solitude. Ils jouent de petites pièces de circonstance : les Axiomatiques. qui se hissent à la hauteur de l’urgence climatique, balaient les affects empêchant l’action: l’angoisse, l’inavouable, le ressentiment, le doute, dressant le sujet contre lui et le monde. 

La pièce finale, farce grotesque, entre fête et enterrement, fait se grimer les interprètes en figures contemporaines : la jeune fille de la maison, promise à des études gratifiantes, abandonne tout pour rejoindre un groupe de résistance. Auparavant, l’un des personnages a déjà mentionné  sa rupture avec le PCF à la Fête de l’Huma, un jour, pour entrer aussi dans un groupe de résistance.

Traquer la joie des idées et des corps grâce au théâtre – manière ludique et shakespearienne de pauses divertissantes, avec « une once de didactisme brechtien, mystère médiéval, théâtre allégorique du siècle d’or espagnol ». Un théâtre baroque de masques, tréteaux, toiles peintes et costumes grandiloquents – répertoire de farces et de tragédies joué en extérieur d’étoiles et pluie. 

Tirer « le voile de pudeur », ce rideau de théâtre et fresque paysagère et verdoyante peinte -, pour s’adresser au spectateur comme à un autre soi, les interprètes offrent au public une soupe chaude à l’entracte, aussi le retour est-il fait à une convivialité familiale inédite qui apaise le public.

Le répertoire des Axiomatiques a vocation à être joué indépendamment de la création des Garçons qui croient […]. Une première tournée des cinq premières Axiomatiques a eu lieu en juillet 2023, lors d’une marche de deux semaines, réalisée en Bourgogne, dans le Parc Naturel Régional du Morvan. Seules deux pièces issues du répertoire des Axiomatiques figurent dans la pièce Les Garçons qui croient sont très seuls, les autres Garçons sont perdus. 

Tous s’apprêtent à partir en Bretagne pour se confronter à l’océan puissant et au déchaînement des éléments mais aussi pour lutter contre les conditions de vie désastreuses des cochons en élevage intensif : et libérer les porcs et les truies et saboter le matériel high-tech de la ferme usine.

Suivons ces Garçons seuls mais qui croient en un avenir autre et un monde salutaire pour tous.

Véronique Hotte  

Du 23 au 30 avril 2024, les 23, 24, 25, 29 et 30 avril à 19h30, vendredi 26 à 20h30, et samedi 27 à 18h, à La Commune – Centre Dramatique National Aubervilliers, 2, rue Edouard Poisson 93300 – Aubervilliers. Tél:01 48 33 16 16.