
Tout commence aux abords de la salle de théatre, une équipe de la police scientifique dûment équipée s’affaire autour du corps d’une jeune femme; une femme plus âgée vient à grand renfort de cris troubler le travail des professionnels avant d’être embarquée.
L’action se déroule ensuite dans la salle du bistrot de ce qu’on imagine une petite bourgade périurbaine, seul lieu de sociabilité et de commerce en tous genres où vont s’affronter les personnages d’une intrigue à deux sous.
Les conceptrices du spectacle, Pauline Collin pour la mise en scène et Claire Barrabès pour l’écriture, ont voulu décrypter les mécanismes de violences de notre société sous toutes ses formes en imaginant un polar façon série B avec tous les ingrédients habituels de ce genre de cuisine télévisuelle qui repose sur la longue tradition des poncifs littéraires du mélo.
A la base le fait divers sordide, la jeune fille martyrisée, le milieu louche ou se côtoient une mère aide à domicile, seule et alcoolique, épuisée par le travail, sa patronne obsédée par le planning des interventions au domicile des personnes âgées de la commune, un patron de bar dealer en tous genres et forcément une prostituée charitable.
Evidemment les trois policiers chargés de l’affaire sont hauts en couleur, l’inspectrice est aussi cash que crad, ces acolytes sont plus pitoyables l’un que l’autre, le tout couronné par un médecin légiste sadique et appliqué comme il se doit.
On est dans l’ambiance jusqu’au cou, entre les manipulations sordides et violentes d’un Lars Von Trier et l’empathie d’un Ken Loach pour les exclus du système. SMOG c’est donc ça, une atmosphère poisseuse et oppressante, clin d’œil à l’Angleterre, terre de Jack l’éventreur et des tabloids dopés aux meurtres crapuleux.
C’est d’ailleurs un docker anglais qui serait le père de la victime.
Tout cela n’est pas non plus très original et il faut l’engagement total des comédiens qui y vont de tout cœur pour incarner ces déshérités exemplaires avec force coups de poings , de claques ou d’enlassements, d’acrobaties ou d’entrées et de sorties tonitruantes, et finalement d’hystérie.
Car l’acmé est atteint quand le médecin légiste devient l’animateur bien connu de » questions pour un champion » ou chacun des protagonistes s’acharne à répondre à des questions métaphysiques et saugrenues dans une sarabande infernale.
Le spectacle tient par l’esprit de troupe qui lui donne son côté grand guignol et son rythme : saluons donc Barbara Allen, Laurie Barthélémy, Claire Barrabès, Florent Dupuis, Quentin Gratias, Stéphanie Marc, Lison Rault, Frédéric Roudier, Sylvère Santin qui campent leur personnage avec truculence et s’empoignent sans retenue.
Un plein de bonne humeur pour conjurer nos fantômes, âmes délicates s’abstenir.
Louis Juzot
Jusqu’au 19 juin, du mardi au samedi 20h30, dimanche à 16h30 Au Théâtre de la Tempête, Cartoucherie, route du champ de manœuvre 75012 Paris www.la-tempete.fr tel :0143283636