Crédit photo : Miliana Bidault.
Rabelais, texte de Jean-Louis Barrault, mise en scène de Hervé Van der Meulen avec le Studio L’ESCA. A partir de 15 ans.
Le Studio d’Asnières est une compagnie théâtrale, en résidence au Studio-Théâtre d’Asnières-sur-Seine; il a pour mission essentielle de favoriser l’émergence de jeunes artistes. Le Studio d’Asnières est la seule compagnie en France qui ait créé un Centre de Formation d’Apprentis pour les comédiens, un organisme de formation devenu Ecole Supérieure d’art dramatique, habilité en 2014 par le Ministère de la Culture, reconnu sous le nom d’ESCA (Ecole Supérieure de Comédiens par l’Alternance). Une quarantaine de jeunes artistes y suivent un enseignement de haut niveau, engagés en contrat d’apprentissage durant trois ans, et jouent lors de créations.
Rabelais de Jean-Louis Barrault a été créé en 2018 – report d’une programmation au Théâtre 13, prévue en 2020 du fait de l’épidémie de Covid-19. Cette reprise en 2021 sur une scène parisienne pour une durée de six semaines et 36 représentations avec une distribution de 18 personnes – dont 13 d’entre elles sont d’anciens apprentis à leurs débuts dans cette profession, et trois encore en apprentissage à l’ESCA – représente un engagement fort de la structure pour l’émergence des jeunes artistes, l’aide de l’ADAMI accordée en 2020 ayant été normalement reportée en 2021.
Enfin, la reprise de ce Rabelais – non remonté à Paris depuis la production originale de Jean-Louis Barrault en 1968 à l’Elysée-Montmartre – sur la scène du Théâtre 13 vient couronner un partenariat de plus de vingt ans avec cette institution parisienne qui a favorisé l’émergence de nombreuses compagnies, de nombreux collectifs et de nombreux artistes issus de l’ESCA. En présentant des spectacles ou en les accueillant au sein du concours annuel ouvert aux jeunes metteurs en scène.
Le metteur en scène Hervé Van der Meulen écrit, à propos du Rabelais de Jean-Louis Barrault, qu’il met en scène avec le Studio d’Asnières de L’ESCA : « La langue y est tellement dense, inventive, jubilatoire, qu’elle verse dans la profération. Les cascades de mots, les ruptures, les inventions, les jeux de sonorités, les onomatopées, les barbarismes composent une matière conviviale – connivence jubilatoire pour ces « folâtries joyeuses », marques d’oralité et de santé.
Une matière festive composée de joyeux propos de table, une littérature de colloques et de banquets « où s’échangent mots et mets ». On boit et on mange beaucoup chez Rabelais – gauloiseries et bâfreries, farces et plaisanteries sexuelles. Sans oublier la Dive Bouteille. Joie et vin comme maîtres de cérémonie qui mettent tout sens dessus dessous, comme aux fêtes des fous issues du Moyen-Age, ou des fêtes de l’âne qui permettaient de célébrer le monde à l’envers.
Actualité événementielle et culturelle du temps de Rabelais et références contemporaines. L’auteur inscrit les aventures de Gargantua, Pantagruel, Panurge, Piccrochole dans son époque : on y voit dans ces personnages les figures de François 1er, d’Henri II, d’Henri VIII d’Angleterre, de Charles Quint…Or, l’imagination, la verve et la joyeuseté, la bouffonnerie, l’esprit farcesque rejoignent l’atemporel – nouvelle vision de l’homme, nouvelle philosophie d’une éthique rabelaisienne autre.
Panurge et les moutons, Panurge et son peu de bravoure, sa peur récurrente face aux éléments. Les femmes sont bien peu de choses dans les propos des hommes – #Metoo n’est pas là encore.
Or, on s’amuse en dépit de tout; la musique originale revient à Marc-Olivier Dupin, la chorégraphie à Jean-Marc Hoolbecq, la scénographie et les accessoires à Claire Belloc, les costumes à Isabelle Pasquier; les lumières à Stéphane Deschamps, la maquillage à Audrey Million. Avec les chefs de chant Juliette Epin Bourdet, Juiette Malfray et Pablo Ramos Monroy, et au son Arthur Petit.
L’esthétique générale privilégie une marque gothique, décors sombres et noirs, habits et robes souvent foncés pour de beaux costumes par ailleurs, maquillages noirs outrés, qui se marient dans l’harmonie avec les diableries joyeuses et la bonne humeur qui se déploient sur le plateau, à travers des comédiens qui déclament en force constante, sans pleins ni déliés ni nuances.
Un spectacle choral de jeunes gens désireux d’apporter leur pierre à l’édifice, un ensemble hétéroclite mouvant, de la scène à la salle et de la salle à la scène, dix-huit comédiens convaincants et enjoués qui parcourent le plateau en se bousculant, mais trouvent leur place.
Avec Etienne Bianco, Loïc Carcassès, Aksel Carrez, Ghislain Decléty, Inès Do Nascimento, Pierre-Michel Dudan, Valentin Fruitier, Constance Guiouillier, Théo Hurel, Pierre-Antoine Lenfant, Olivier Lugo, Juliette Malfray, Mathias Maréchal, Ulysse Mengue, Théo Navarro-Mussy, Fany Otalora, Pier-Niccolo Sassetti, Jérémy Torres, Agathe Vandame.
Véronique Hotte
Présentation du 4 mai au Théâtre 13 / Jardin, 103a boulevard Auguste Blanqui 75013 – Paris. Représentations ouvertes au public du 1er au 19 juin : du 1er au 8 juin, du mardi au samedi à 18h, dimanche à 16h; du 9 au 19 juin, du mardi au samedi à 20h, dimanche à 16h, relâche lundi.